Cellules, Mona Hatoum

2012

Images demandées

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Photographies pour la communication et le catalogue des expositions à Marseille pour la capitale culturelle de 2013 et au Centre Pompidou en 2015

Extrait des propos recueillis par Christine van Assche, commissaire de l’exposition.

Dans notre monde mû par des contradictions, des tensions géopolitiques, des esthétiques diversifiées, Mona Hatoum nous offre un œuvre qui atteint une universalité inégalée, un œuvre devenu « modèle » pour de nombreux artistes contemporains. L’artiste britannique, d’origine palestinienne, est l’une des représentantes incontournables de la scène contemporaine internationale. Son œuvre s’impose par la justesse de son propos, par l’adéquation entre les formes et les matériaux proposés, par la pluridisciplinarité de son travail et finalement par sa relecture originale et engagée des mouvements d’art contemporain (performance, cinétisme, minimalisme). Après avoir réalisé, voilà vingt ans, la première exposition muséale dédiée à l’œuvre de Mona Hatoum, le Centre Pompidou lui consacre aujourd’hui une première grande monographie qui réunit une centaine d’œuvres et rend compte de la pluridisciplinarité de son travail, de 1977 à 2015. Sans chronologie, comme une « cartographie » de la trajectoire de Mona Hatoum, l’exposition offre au public une traversée de son œuvre par affinités formelles et sensibles. Ainsi les performances des années 1980, qu’elles soient documentées en photos, dessins ou vidéos, sont mises en relation avec des installations, des sculptures, des dessins, des photographies et des objets datant de la fin des années 1980 à aujourd’hui.

Mona Hatoum, née au Liban en 1952 de parents d’origine palestinienne, quitte ce pays en 1975 pour un court séjour à Londres au moment où la guerre éclate au Liban. Elle reste dans la capitale britannique où elle commence des études d’art. Deux grandes périodes divisent son travail. Durant les années 1980, Mona Hatoum explore le territoire de la performance et de la vidéo. Son œuvre est alors de nature narrative et se penche sur des questions sociales et politiques. Depuis les années 1990, sa production est caractérisée par des œuvres plus « permanentes », des installations, des sculptures ou des dessins. Se plaçant désormais dans des perspectives d’avant-garde, Mona Hatoum explore des installations influencées par le cinétisme et les théories phénoménologiques, ou d’autres installations qu’on pourrait définir comme postminimalistes, utilisant des matériaux trouvés dans le monde industriel (grilles et fils de fer barbelé) ou dans son propre environnement (cheveux). Certaines de ses installations et de ses sculptures, engagées pour la plupart, sont orientées par le féminisme. Autour d’elles gravitent des objets plutôt surréalistes, des travaux sur papier réalisés avec des matériaux du quotidien inhabituels ou des photographies prises lors de voyages, et en lien avec d’autres œuvres de l’exposition.

Entretien avec l’artiste.

Christine van Assche Vous avez passé vingt-trois ans au Liban où vous êtes née, et vous vivez depuis quarante ans entre la Grande-Bretagne et Berlin. Comment vous situez-vous entre ces différentes cultures, entre le Moyen-Orient et l’Occident, ou plutôt comment situez-vous votre travail ?
Mona Hatoum – Je ne crois pas qu’il faille penser à mon travail en ces termes. Je trouve dommage que les gens approchent mon travail dans l’idée de le connecter à mes origines. Cela limite leur lecture et élude les subtilités formelles et l’expérience complète que peuvent offrir mes œuvres. Mon travail utilise la géométrie, l’abstraction et le langage formel de l’art. Les grandes installations que j’ai créées depuis le début des années 1990 font référence à l’architecture, aux structures du pouvoir et du contrôle que j’ai observées en Occident. Mes racines sont au Moyen-Orient. Toute ma scolarité s’est déroulée à Beyrouth, ville cosmopolite où j’ai étudié dans une école française avant de terminer mes études dans une école italienne, pour ensuite rejoindre une université américaine. Bien avant de quitter le Liban, j’étais donc déjà exposée à des influences très diverses et éclectiques. C’est une situation typique de la condition postcoloniale dans les régions arabes et nord-africaines, où la conjonction de multiples influences culturelles nourrit la psyché de sa complexité, de sa richesse. J’ai désormais passé les deux tiers de ma vie en Angleterre, et, depuis plus récemment, je partage mon temps entre Londres et Berlin. J’ai donc vécu une expérience culturelle hybride, une existence plurielle, et je pense que cela se reflète clairement dans la diversité formelle et les approches multiples qui se font jour dans mon travail.

CVA – Qu’entendez-vous par la référence aux « structures du pouvoir occidentales » ?
MH – La surveillance permanente exercée sur la société est une des premières choses qui m’a frappée lorsque je suis arrivée en Angleterre. À la fin des années 1970, mon engagement auprès de groupes féministes m’a conduite à examiner les relations de pouvoir qui existaient, d’abord à travers le prisme du fossé entre les genres, puis à travers celui des relations entre les races. J’ai également observé que l’institution bureaucratique dont je faisais partie à l’époque (University College London) était un microcosme de pouvoirs coloniaux. Cette observation m’a poussée à analyser la relation entre l’Occident et le tiers-monde. À l’époque, je lisais Foucault et Bataille et me suis intéressée de près aux concepts de Panopticon et de surveillance, ainsi qu’à d’autres mécanismes de contrôle étatique.