Périple ou la Nostalgie d’une Montagne
2024
Périple ou la Nostalgie d’une Montagne
Je me figure que celui ou celle qui vit ici, a une connaissance précise du monde qui l’entoure.
Un montagnard, comme un marin, sait d’où vient le vent.
Il connaît les vacillements de la météo, l’imprévisibilité des orages.
La montagne, comme la mer, parle.
Parfois tout bas.
Parfois, avec le verbe haut.
Il faut être capable d’entendre le moindre de ses murmures. Le montagnard sait lire la montagne.
Je suis née ici, pourtant, je suis une analphabète.
Je ne sais pas la lire.
Je sais simplement qu’elle est incroyablement belle et mortellement imprévisible, qu’elle est bien plus puissante et mystérieuse que nous-même.
La solastalgie, c’est cette tristesse que l’on ressent en regardant, impuissant, disparaître un paysage aimé.
C’est une sorte de nostalgie, mais dans le futur.
On est encore là, c’est le lieu qui nous quitte.
Mon pays d’enfance n’est plus de ce monde.
Il n’est plus repérable sur aucune carte.
Il est simplement dans ma tête, et sur ces quelques photos.
Heureusement, répartie partout dans le monde, il existe encore une couche plus brute, plus organique de l’humanité.
Il y a plein de petites constellations de gens qui dansent ou chantent, pour faire tomber la pluie.
Il y a des hommes et des femmes qui parlent aux montagnes.
Ils font des fêtes pour ces montagnes, ils leur font des cadeaux, et reçoivent eux-mêmes des cadeaux de la montagne.
Alix Denambride, Juillet 2024